top of page

Haut-potentiels, précoces, surefficients et autres zèbres…


Souvent idéalisés, beaucoup trop médiatisés, parfois fantasmés…

Tellement d’articles et d’émissions effleurent ou banalisent le sujet.

Tellement d’enfants se voient coller cette étiquette un peu rapidement, comme si elle expliquait tous les comportements, atypies ou autres singularités.

Tellement d’adultes disent y trouver finalement une explication à des choses qu’ils semblent vivre depuis l’enfance.

Tellement d’instituteurs ou de professeurs se trouvent démunis face à ces profils qu’ils peinent souvent à identifier et pour lesquels ils n’ont pas été formé.

Cette population est, depuis quelques années, devenue à la mode, parfois stigmatisée, de temps à autre enviée, souvent idéalisée, occasionnellement caricaturée. Comme si « en être », était un atout indéniable qui permettait d’attirer les regards, avec un mélange d’admiration et de compassion.


Précoce, surdoué, surefficient, doté de douance, Haut Potentiel (HP), Zèbre, …. Et j’en oublie certainement. Les appellations se sont succédées au fil des années illustrant la difficulté de poser un nom juste sur cette population.


L’appellation surdoué comme celle de haut potentiel, avec sa déclinaison de HPI (haut potentiel intellectuel) et HPE (haut potentiel émotionnel), et HPC (haut potentiel créatif) est une des plus répandue. Je n’aime pas ces appellations car elles induisent en filigrane une notion de supériorité et une obligation de réussite ou de performance parfaitement contreproductive pour ces individus.


La notion de précocité qui est souvent appliquée aux enfants n’a pas de sens. Étymologiquement précoce vient du latin praecoquo (prae et coquo) qui signifie « murit avant l'heure ». Cette avance par rapport à une même classe d’âge laisse entendre qu’à un moment donné les choses se normalisent. Quel est ce moment ? Lorsqu’ils arrivent à l’âge adulte ? Indépendamment de savoir ce qui peut être considéré comme « l’âge adulte », cela suppose qu’à l’âge adulte on « redevient comme tout le monde », que cette particularité se résorbe…. Ce qui n’est pas le cas et ne peut pas être le cas et nous verrons pourquoi.


L’appellation Zèbre apparue en 2000 dans le 1er ouvrage de Jeanne Siaud-Facchin et entrée dans le Larousse en 2021 est aujourd’hui celle qui est la plus souvent retenue en particulier dans les médias. Mais là encore les raisons de cette dénomination (les rayures d’un zèbre sont uniques, le zèbre est le seul équidé jamais domestiqué, …) me laissent un peu perplexe. Néanmoins je dois reconnaitre qu’elle met à distance cette notion de supériorité et met en exergue la différence, … car il s’agit bien juste de différences.


Mais avant toute chose, coupons la tête à tous les mythes, croyances ou idées reçues.

Non, être Zèbre/HP ne veut pas dire :

Être le premier en classe et survoler le programme,

Être heureux à l’école et s’épanouir dans l’apprentissage,

Être un génie et répondre instantanément à toutes les questions quel qu’en soit le domaine,

Avoir une réussite professionnelle fulgurante,

Avoir les bottes secrètes qui, comme au jeu du 1000 bornes, vous permettent d’éviter les obstacles,

Être à l’aise en société et capable de nouer des relations facilement,

Être sûr de soi, de ses compétences et avoir une image positive de soi.


Être Zèbre/HP n’est pas un passe magique qui ouvre nécessairement les portes du bonheur et de la réussite, loin s’en faut.

Être Zèbre/HP, c’est une façon de penser, de réfléchir et d’être différente des autres.




L’anatomie du zèbre


Parler des HP/Zèbres sans comprendre l’origine de ces particularités n’a pas de sens. Il est donc important de commencer par une petite présentation simple de notre cerveau, ce centre de contrôle qui gère tout ce que nous faisons et est à l’origine de ces singularités.


On peut comparer le cerveau à une « centrale nerveuse » extrêmement complexe. Notre boite crânienne renferme plusieurs milliards de neurones connectés les uns aux autres. Le cerveau est constitué, entre-autre, de 2 hémisphères reliés entre eux par un réseau de fibres appelé le « le corps calleux ». Ces hémisphères sont recouverts d’un tissu plissé formant des sillons. Ce tissu appelé Cortex ou plus communément matière grise contient les neurones.

Chaque hémisphère reçoit les informations sensitives et ordonne les réactions de la région opposée du corps.


Chaque hémisphère est composé de 4 zones que sont

- Le lobe frontal : on dit qu’il est « le siège des fonction exécutives supérieures ». Il est impliqué dans l’initiation et la coordination des mouvements, le raisonnement, les fonctions de langage, la planification et la gestion rationnelle des émotions.

- Le lobe pariétal : lieu de la conscience du corps. Il intervient dans l’intégration des informations sensorielles provenant des différentes zones du corps (vision, toucher, audition, …). Il est aussi impliqué l’attention (système visuel) et dans la perception de l’espace.

- Le lobe temporal : zone importante car elle traite des informations auditives, visuelles, … et forme les souvenirs.

- Le lobe occipital : traitement des informations visuelles avant transmissions aux autres zones du cerveau.


Les lobes et leurs fonctions

Institut du cerveau



Alors, qu’elles sont ces différences ?


Les HP/Zèbres n’ont rien de plus que les autres. Ils sont justes différents, atypiques. Être Zèbre/HP c’est avant tout une réalité neurobiologique. Le fonctionnement du cerveau n’est pas le même. Bien sûr les composants sont les mêmes mais quelques particularités d’assemblage ont été introduites. Tous ces éléments ont été identifiés et confirmés par différentes études. L’imagerie médicale a beaucoup apporté et est venue expliquer scientifiquement les constats faits par les cliniciens spécialisés sur ce sujet.




Tout d’abord la vitesse de connexion


Prenons 5 minutes pour illustrer de façon basique le fonctionnement neuronal.

Imaginez le neurone comme un arbre avec ses racines, son tronc et son feuillage.



Neurone, axone et dendrites


Les branches et feuilles de cet arbre sont les dendrites. Elles recueillent les informations et les centralisent vers le corps cellulaire qui intègre ces informations. La transmission est ensuite assurée par l'axone (le tronc). Les synapses au bout de l’axone jouent le rôle de racines et assurent la connexion avec les branches et feuilles de l’arbre d’à côté. Chaque neurone reçoit ainsi des influx nerveux de plusieurs milliers d'autres neurones.

Les axones se recouvrent souvent d’une substance blanche appelée myéline. Cette myéline joue le rôle primordial d’isolant et permet à l’influx nerveux de circuler plus rapidement.


Mais voilà, chez les HP/Zèbres, la myélinisation des axones est plus intense et le flux électrique s’en trouve accéléré, … il passe en haut débit.



Des zones cérébrales activées différentes


Les études faites en imagerie cérébrale ont permis de mettre en évidence, à tâche équivalente, un mode de fonctionnement du cerveau différent chez les HP/Zèbres.


Par exemple, lors de tâches répétitives, c’est le lobe pariétal, siège des automatismes, qui entre en action plutôt que le lobe frontal. Les tâches sont donc exécutées plus rapidement. Moins de ressources, d’énergie, d’efforts et d’attention sont donc nécessaires, ce qui, il faut le reconnaitre est un sacré avantage.


Le cerveau ne travaille pas plus, mais de façon plus efficace. Il est capable d’engager, dans certaines situations, d’engager plusieurs zones en même temps et de désengager les zones qui ne sont pas utiles.

Pour traiter une information le HP/Zèbre va utiliser simultanément plusieurs zones du cerveau utilisant des réseaux de neurones qui communiquent rapidement entre eux.

C’est le cas par exemple avec le réseau fronto-pariétal, utilisé dans les tâches plus abstraites nécessitant une réflexion plus poussée. Cette utilisation rapide des réseaux de neurones donne un aspect presque intuitif à la pensée.


En résumé, un flux plus rapide entre les neurones due à une myélinisation plus dense, une utilisation simultanée des deux hémisphères du cerveau et une très bonne connectivité entre les différentes régions du cerveau sont les principales différences de fonctionnement.


Mais évidemment il s’agit ici d’une vision simplifiée du fonctionnement cérébral car même au sein de cette population différents profils existent, présentant pour certains des difficultés spécifiques.



Être HP/Zèbre c’est, de fait, une intelligence différente, un comportement psycho-affectif particulier qui nécessitent un accompagnement spécifique.



Être différent n’est ni une bonne chose, ni une mauvaise chose. Cela signifie simplement que vous êtes suffisamment courageux pour être vous-même - Albert Camus



Pour aller plus loin :


Trop intelligent pour être heureux – Jeanne Siaud-Facchin


bottom of page